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Éloge d’une planche à découper : pourquoi j’ai choisi le bois ?

Si l’on trouve généralement celles en bois plus esthétiques voire tendances, les planches à découper en plastique ont parfois encore la réputation d’être plus durables, plus faciles à nettoyer et donc plus hygiéniques. Est-ce vrai ? Et quid du verre ou du marbre ? Je vous explique pourquoi j’ai fait le choix du bois.

J’ai besoin de le dire tout de suite : oui, il peut sembler un peu anachronique cet article, du moins toute sa première partie. Le plastique n’a plus la côte ces derniers temps (et c’est tant mieux pour des milliers de raisons). Pourtant la question se pose encore régulièrement quand il s’agit de planches à découper, parfois même chez des personnes qui en ont une dans un matériau autre que du plastique. C’est que les idées reçues ont la vie dure et c’est pour ça que je tenais à l’écrire, cet article !

Du plastique et des idées reçues

Les planches à découper seraient faciles à nettoyer, solides et plus durables dans le temps lorsqu’elles sont en plastique. Elles sont disponibles en plein de couleurs, de motifs et de textures. Elles sont plus légères et coûtent parfois moins cher. Bref, jusqu’ici que des avantages pour le plastique !

Pour trancher la question plastique versus bois, je me souviens d’une ancienne connaissance qui usait d’un argument d’autorité : « lors de mes études de cuisine, on n’utilisait que des planches à découper en plastique ». Puisqu’à son école de cuisine on coupait sur du plastique et rien d’autre, il ne fallait pas aller plus loin ni chercher d’autres arguments : ce matériau était définitivement plus hygiénique et durable (pas au sens de la planète évidemment, mais au sens de la durée de vie dans la cuisine, post-achat).

« Plus hygiénique et plus durable », donc. Vous êtes prêts pour une déconstruction d’idées reçues ?

Le plastique n’est pas plus durable que le bois pour découper des aliments

Commençons par l’argument de la durée de vie, et celui-là ne tient pas longtemps, vous allez voir !

Quand la connaissance dont je parlais un peu plus haut me vantait l’aspect durable dans le temps des planches à découper en plastique, j’avais franchement du mal à être vraiment convaincu. Quand je regarde la plupart des planches à découper en plastique qui ont déjà pas mal servi, je vois des traces de découpes qui sont souvent plus marquées, plus nombreuses et plus visibles que sur celles en bois.

Planche à découper abimée en plastique

C’est d’ailleurs encore plus flagrant sur les planches colorées qui finissent très blanchies par les stries provoquées par les lames. Niveau durée de vie de l’objet en lui-même (ou de son esthétique, car certains remplacent les objets qui leur semblent trop abîmés), on devra donc repasser.

Et quand vous regardez de près, ça provoque bien plus que de simples marques de découpe sur la planche. À force, ça fait des particules de plastique qui se détachent et se mélangent de fait avec les aliments posés sur la planche, qu’on s’en rende compte ou non. Et si ça se mélange ou s’accroche aux aliments, pas de surprise, ça termine dans l’estomac… Vous m’accorderez que ce n’est pas très recommandé de se nourrir de micro-plastiques (et ce qu’il s’agisse de PVC, de polyéthylène ou encore de PP) !

Alors certains me diront qu’avec le bois c’est pareil ! Il y a de petits bouts qui se détachent parfois, surtout lorsqu’on donne un profond coup de couteau. N’étant pas un poêle à bois (du moins aux dernières nouvelles), je ne suis pas fan de la perspective de manger des nano-copeaux de bois, certes. Mais je préfère nettement ça à celle d’ingérer des bouts de plastique !

Donc, à la longue, une planche à découper en plastique se « dépiaute » et marque autant voire davantage qu’une planche en bois. Et ce qui s’est détaché finit en partie dans nos estomacs. Qui avait parlé de « durable » ?

Non, le plastique n’est pas plus hygiénique que le bois. Au contraire !

Ensuite vient l’argument de l’hygiène. Pour le coup il est plus complexe celui-ci, même si le résultat est sans appel !

On s’imagine souvent, à tort (y’avait pas de gros suspense), que le plastique est un matériau qui va faciliter le nettoyage et le rendre plus efficace. Et quand je dis « on », je m’inclus : j’ai beau avoir depuis de nombreuses années une planche en bois, j’étais jusqu’il y a peu persuadé que les planches en plastique étaient forcément plus propres si on utilisait un microscope en guise d’arbitre ou de juge de paix.

Des chercheurs se sont penchés sur la question au début des années 90 (donc ça remonte), à une époque où l’on n’avait pas d’a priori aussi négatifs qu’aujourd’hui sur le plastique. Leur intention était de démontrer que les planches à découper en plastique étaient justement plus hygiéniques que celles en bois.

Eh bien ils n’ont pu que prouver l’inverse !

Comment est-ce possible ? Pour la faire très courte, le bois étant poreux, les bactéries, germes et autres microbes sont très rapidement embarqués à l’intérieur du bois par capillarité. Totalement pris au piège, tout ce beau monde finit par y mourir. Ce piège est impossible à reproduire avec du plastique. Pire encore, les bactéries profitent des stries provoquées par les lames de couteaux pour se « planquer » et se reproduire plus tranquillement, et ce malgré nettoyage de la planche. Double désavantage pour les marques de découpes sur les planches en plastique donc !

Si vous souhaitez en savoir plus et l’anglais vous donne bonne mine, je vous laisse voir cet article du NYTimes qui synthétise la principale étude concernée (étude que vous retrouverez facilement en ligne).

Quand on y pense, les billots de bouchers sont traditionnellement en bois. Si le bois s’est fait une telle place auprès de ce corps de métier, même avant l’avènement du plastique, c’est qu’il répondait aux besoins, notamment sur le plan sanitaire.

Donc oui, le bois est durable et facile à entretenir

Je suis donc team bois. D’abord pour des raisons esthétiques et parce que j’aime les matières nobles. Ensuite parce qu’en approfondissant le sujet (au point d’en faire cet article) je me suis rapidement rendu compte que c’était le meilleur choix possible pour une planche à découper. (Je parle du verre et du marbre plus loin.)

Le bois est hygiénique comme on vient de le voir, le bois est beau, le bois vieillit bien lorsqu’il est utilisé en billot ou en planche à découper et enfin le bois est facile à entretenir !

Planche à découper PROPPMÄTT en boisVoici ma PROPPMÄTT, 5 ans.

Ma planche à découper, achetée chez Ikea et portant le doux et poétique nom de PROPPMÄTT, me dure depuis 5 ans. Et pourtant elle est utilisée tous les jours ou presque. Non seulement elle est toujours en très bon état, mais elle a même pris une jolie patine. Vous pouvez me croire puisque vous la connaissez : c’est elle qui sert de décor à la quasi-totalité de mes photos de plats !

Niveau entretien, on oublie évidemment le lave-vaisselle ou les longues sessions de trempage dans l’évier de la cuisine. Mais une bonne planche à découper en bois ne craint ni un passage sous l’eau du robinet (il faut simplement retirer le gros de l’eau avec un torchon immédiatement après le rinçage), ni un liquide vaisselle doux ! Nettoyer une telle planche n’est donc pas un problème !

Et pour qu’elle dure des années, il faut simplement penser à régulièrement la huiler avec une huile de cuisine. Perso je fais ça sur ma planche avec de l’huile d’olive tout ce qu’il y a de plus classique, trois à quatre fois par an.

Ok, le bois c’est bien, mais quel bois ?

L’essence qu’on trouve le plus pour les planches à découper en bois est le hêtre. C’est un bois relativement dur, une vraie valeur sûre. Ce n’est pas l’essence qui résiste le mieux à l’eau, mais ce n’est pas fait de sucre non plus. Ma douce PROPPMÄTT est justement en hêtre et, comme déjà dit, elle se porte comme un charme malgré ses 5 ans d’usage intensif derrière elle. Au pire, on huile un peu plus souvent qu’avec du bambou (transition posée !).

Le bambou c’est donc l’autre essence pleine d’avantages et qu’on trouve assez facilement dans le commerce. Ce bois est plus dur que le hêtre (sans pour autant abîmer les lames de couteaux) et résiste mieux à l’eau. Pour une planche à découper c’est plutôt pas mal. Après, esthétiquement c’est un vrai choix, le bambou c’est particulier.

D’autres essences sont parfois utilisées, notamment le chêne, l’olivier, l’acacia ou encore le bois d’hévéa (surtout pour les planches en bois de bout/en damier pour ce dernier). Si ces essences sont moins utilisées c’est qu’elles répondent moins au sacro-saint rapport qualité-prix (elles coûtent souvent plus cher ou durent moins longtemps). C’est à vous de voir quand vous faites votre choix !

Attention simplement à ne pas acheter une planche en bois anormalement peu chère et/ou d’origine inconnue, surtout s’il y a une couche de vernis dessus ou que le bois semble teinté. Pouvez-vous certifier de la qualité alimentaire du vernis ou que la teinte utilisée ne contient pas de substances toxiques qui seront petit à petit restituées sur les aliments ? (Coucou les planches cheloues made in on-sait-pas-vraiment-où de chez Gifi, Tati & co !)

Quid des planches en verre trempé ou en marbre ?

Le verre (trempé dans le cas d’une planche de cuisine) n’est pas mon matériau préféré pour pratiquer la découpe en cuisine. Certains coups de couteau provoquent un bruit et une sensation épouvantables (rien que ça !). Ça évoque de loin la craie qui crisse sur un tableau (brrrrr). Et en parlant de couteaux et de verre, ce dernier étant très dur, il a tendance à user les lames plus rapidement que les planches en bois.

J’utilise néanmoins une petite planche à découper en verre pour certains aliments sensibles niveau contamination et/ou pénibles à nettoyer si on repousse un peu le moment de la vaisselle. C’est typiquement le cas du poulet : le bois a beau être hygiénique, c’est un aliment sensible (principalement à cause de la salmonelle). Si je veux couper dans la minute qui suit des légumes sur la même planche (ou avec le même couteau non nettoyé d’ailleurs), je prends un risque. Entre ça et le fait que la volaille crue colle terriblement en séchant, je prends direct la planche en verre qui est plus facile à nettoyer.

D’ailleurs, l’étude du Dr. Cliver déjà citée insiste sur ce point. Quel que soit le matériau de votre planche à découper, soyez rigoureux/rigoureuses dans le nettoyage au contact de certains aliments. J’ai donné en exemple le cas du poulet, mais il en va notamment de même pour toutes les viandes, les poissons ou encore les fruits de mer.

Autre cas où le verre est très pratique : avec les aliments qui tachent. Je ne vais pas couper en tranches une betterave sur du bois, au risque de tacher à jamais ma planche. Sur ma petite planche en verre par contre il n’y a aucun risque de tache !

Le marbre quant à lui ressemble beaucoup au verre trempé. C’est déjà le cas pour la sensation de découpe, qui est tout aussi particulière. Il use aussi beaucoup les lames de couteaux puisque c’est un matériau très dur. Passé le fait qu’une planche à découper en marbre peut être magnifique (il faut bien le reconnaître), il y a quand même un gros défaut : le marbre est poreux et tache donc plutôt facilement. Tous ces points en font d’après moi un matériau à éviter pour une planche à découper. Sauf si c’est juste pour décorer évidemment.

Donc en bois ?

Parce que j’ai déjà beaucoup plus écrit que je ne le pensais au départ, le résumé va être aussi court que sans surprises : si le verre trempé et le marbre lui résistent un peu, oui, en bois car il surclasse tout le monde. C’est un matériau aussi beau que noble et aussi vivant qu’authentique. C’est lui qu’il faut privilégier au moment de l’achat d’une planche pour couper ses aliments en cuisine. Le plastique est quant à lui totalement hors course, même sur le plan de l’hygiène.

Bref, au royaume des planches à découper on dit « vive le bois » et « à mort le plastique » !

Rédigé avec passion, publié le 8 Décembre 2019
Un article c'est comme la cuisine : ça se partage !
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